Le ministère de la Culture «a pour mission de rendre accessibles au plus grand nombre les oeuvres capitales de l’humanité et d’abord de la France
»1. La principale mission confiée aux ministres qui se sont succédé rue de Valois, l’adresse parisienne du ministère, n’a guère varié depuis la création, en 1959, d’un ministère des Affaires culturelles2. Elle repose essentiellement sur la démocratisation culturelle.
«L’accès de tous à la culture, dans une logique du lien social, d’émancipation et d’intégration
» constitue l’objectif poursuivi par l’actuelle politique culturelle française en vertu de la feuille de route dressée par le Premier ministre3. «Priorité
» du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, la culture devait avoir une place proéminente dans la deuxième partie de son premier mandat. Le Président de la République entendait en effet «dessiner un nouveau chemin
» autour notamment de la reconstruction culturelle du pays, avait-il expliqué dans un entretien à la presse quotidienne régionale.
L’étendue des attributions ministérielles
L’administration centrale de la culture a vu ses attributions s’étendre bien au-delà de la démocratisation de l’accès à la culture au cours des années. De nombreuses autres tâches occupent l’actuel ministre responsable de la culture4, Rachida Dati. Elle conduit d’abord la politique de sauvegarde, de protection et de mise en valeur du patrimoine culturel, tout en concourant à la création des oeuvres de l’art et de l’esprit.
La ministre assume désormais pleinement la mission économique du ministère et prend en compte l’environnement numérique. Elle assure en effet le développement des industries culturelles et créatives, ainsi que des nouvelles technologies de diffusion de la création et du patrimoine. Elle veille plus particulièrement à la valorisation des contenus et des services culturels numériques.
L’administration culturelle intervient également dans les domaines du spectacle vivant, des arts plastiques, de l’architecture, de la langue française, de la création audiovisuelle, des médias, des fondations et du mécénat. Elle coordonne enfin, depuis avril 2019, la politique nationale visant à identifier et restituer les biens culturels spoliés entre 1933 et 19455.
Les enjeux des affaires culturelles
Si les ministres responsables de la mise en oeuvre de la politique culturelle de la France demeurent des personnages courtisés dans tous les gouvernements, leur poids politique n’est pas toujours à la hauteur de leur importance symbolique. Il varie en fonction de critères tels que la personnalité de l’occupant du Palais royal, siège du ministère, des liens privilégiés qu’il entretient avec le Président de la République ou de la place qu’il occupe dans les cercles du pouvoir parisien.
Il arrive parfois que le ministre soit marginalisé par un conseiller du Premier ministre ou du Président de la République, des conseillers susceptibles de devenir ministre à leur tour6. Ces conseillers – audiovisuel, communication, culture, etc. – jouent parfois un rôle prépondérant dans les arbitrages en matière culturelle. Cette réalité n’explique pas toujours pourquoi certains ministres font un passage à la tête de l’administration culturelle moins remarqué, parfois injustement, comme Jean-Philippe Lecat7, alors que d’autres laissent leur nom à la postérité, comme André Malraux et Jack Lang.
L’histoire des administrations culturelles
Il est généralement admis que le ministère des Affaires culturelles, créé en 1959, constitue la première véritable administration centrale de la culture en France. Le premier gouvernement de la IVe République, celui de Paul Ramadier, comptait pourtant un ministère de la Jeunesse, des Arts et des Lettres8. Il est vrai cependant qu’il a été rattaché au ministère de l’Éducation nationale dix mois seulement après sa création9. Il possédait de larges attributions10, bien plus étendues que celles d’André Malraux.
Il s’agit là de la seule expérience d’un ministère autonome consacré à la culture durant la première moitié du XXe siècle. Il faut remonter au XIXe siècle pour retrouver des expériences comparables. À la fin du Second Empire et au début de la IIIe République, l’administration de la culture a connu de courtes périodes d’autonomie avec le ministère des Beaux-Arts11, le ministère des Lettres, Sciences et Beaux-Arts12 et le ministère des Arts13.
Plusieurs personnes ont dirigé l’administration centrale de la culture au cours de ces années. La liste présentée ci-dessous des titulaires du poste, de 1947 à nos jours, met en évidence les différentes appellations du ministère en fonction des gouvernements qui ont présidé aux destinées de la France durant les IVe et Ve Républiques. Les variations éventuelles de ces appellations sont indiquées entre parenthèses et chacun des noms des ministres est suivi de la période durant laquelle il a exercé son mandat.
Dernière mise à jour: 12 janvier 2024
Liste des titulaires du poste
Ministère de la Jeunesse, des Arts et des Lettres
Pierre Bourdan (janvier à novembre 1947)
Ministres des Affaires culturelles
André Malraux (janvier 1959 à juin 1969)
Edmond Michelet (juin 1969 à octobre 1970)
André Bettencourt (intérim, octobre 1970 à janvier 1971)
Jacques Duhamel (janvier 1971 à mars 1973)
Maurice Druon (avril 1973 à février 1974)
Alain Peyrefitte (… et de l’Environnement, mars à mai 1974)
Secrétaires d’État à la Culture
Michel Guy (juin 1974 à août 1976)
Françoise Giroud (août 1976 à mars 1977)
Ministres de la Culture
Michel d’Ornano (… et de l’Environnement, mars 1977 à mars 1978)
Jack Lang (mai 1981 à mars 1986)
Jack Lang (ministre de l’Éducation nationale et…, avril 1992 à mars 1993)
Jacques Toubon (… et de la Francophonie, mars 1993 à mai 1995)
Philippe Douste Blazy (mai 1995 à juin 1997)
Françoise Nyssen (mai 2017 à octobre 2018)
Franck Riester (octobre 2018 à juillet 2020)
Roselyne Bachelot-Narquin (juillet 2020-mai 2022)
Rima Abdul Malak (mai 2022-janvier 2024)
Rachida Dati (depuis janvier 2024)
Ministres de la Culture et de la Communication
Jean-Philippe Lecat (avril 1978 à mars 1981)
Michel d’Ornano (intérim, mars à mai 1981)
François Léotard (mars 1986 à mai 1988)
Jack Lang (mai 1988 à avril 1992)
Catherine Trautmann (juin 1997 à mars 2000)
Catherine Tasca (mars 2000 à mai 2002)
Jean-Jacques Aillagon (mai 2002 à mars 2004)
Renaud Donnedieu de Vabres (mars 2004 à mai 2007)
Christine Albanel (mai 2007 à juin 2009)
Frédéric Mitterrand (juin 2009 à mai 2012)
Aurélie Filippetti (mai 2012 à août 2014)
Fleur Pellerin (août 2014 à février 2016)
Audrey Azoulay (février 2016 à mai 2017)
1 Décret no 2022-844 du 1ner juin 2022 relatif aux attributions du ministre de la Culture, JORF, 2 juin 2022, texte nno 29, art. 1, al. 1.
2 Décret no 59-889 du 24 juillet 1959 portant organisation du ministère chargé des Affaires culturelles, JORF, 26 juillet 1959, p. 7413, art. 1er.
3 Premier Ministre, Feuille de route du ministère de la Culture, 9 août 2017, p. 1.
4 Décret no 2022-844, op. cit., art. 1 à 5.
5 Décret no 2019-328 du 16 avril 2019 modifiant le décret no 2009-1393 du 11 novembre 2009 relatif aux missions et à l’organisation de l’administration centrale du ministère de la Culture et de la Communication, JORF, 17 avril 2019, texte no 40.
6 Avant d’être nommée ministre de la Culture et de la Communication, Audrey Azoulay a été conseillère culture et communication au cabinet du président de la République François Hollande (Arrêté du 29 août 2014 portant nomination à la présidence de la République, JORF, 31 août 2014, texte n° 2). Il en va de même pour Rima Abdul Malak qui a été conseillère culture et communication au cabinet du président de la République Emmanuel Macron.
7 Françoise Mosser, Entretiens avec Jean-Philippe Lecat – Ministre de la culture et de la communication – 1978-1981, Paris, La Documentation française, 2016.
8 Décret portant nomination des membres du gouvernement, 22 janvier 1947, JORF, 23 janvier 1947, p. 939.
9 Décret no 47-2147 du 12 novembre 1947 transférant au ministre de l’Éducation nationale certaines attributions du ministre de la Jeunesse, des Arts et des Lettres, JORF, 13 novembre 1947, p. 11169.
10 Décret no 47-627 du 5 avril 1947 relatif aux attributions du ministre de la Jeunesse, des Arts et des Lettres, JORF, 6 avril 1947, p. 3280, art. 1er et 3.
11 Décret impérial qui sépare le ministère des Beaux-Arts du ministère de la Maison de l’Empereur, 2 janvier 1870, XIe, Bull. 17, no 390, art. 1er.
12 Décret impérial portant distraction de divers services du ministère de l’Instruction publique pour être placés dans les attributions de celui des beaux-arts, qui prendra le titre de ministère des Lettres, Sciences et Beaux-Arts, 15 mai 1870, XIe, Bull. 1804, no 735.
13 Décret relatif à la création d’un ministère des Arts, 14 novembre 1881, XIIe, Bull. 661, no 163.